Le Congrès du travail du Canada (CTC) applaudit à l’annonce faite le 15 décembre 2011 par Jason Kenney, ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, selon laquelle les aides familiaux résidants pourront enfin obtenir des autorisations d’emploi ouvertes après avoir accumulé près de 4 000 heures d’emploi.
La décision aurait dû être prise il y a longtemps à l’égard des membres de ce groupe à prédominance féminine qui étaient obligés de demeurer liés à un employeur pouvant facilement violer les normes du travail pendant qu’ils attendaient que leur demande de résidence permanente soit étudiée. La procédure était auparavant longue et contribuait à une situation de travail en servitude.
Hassan Yussuff, secrétaire-trésorier du CTC, dit que « les avantages des autorisations d’emploi ouvertes aident à compenser l’inégalité du rapport de forces entre les travailleuses et travailleurs migrants et les
employeurs ».
En l’absence du changement en question, si les employeurs versent des salaires inférieurs au minimum ou n’assurent pas des niveaux suffisants de sécurité au travail, au mépris des normes du travail, les aides familiaux résidants doivent soit accepter la situation, soit porter plainte
et risquer de perdre leur permis de travail et leur emploi.
Malheureusement, il est courant que les employeurs ne respectent pas les normes du travail. Même dans la province du ministre Kenney, le ministère de l’Emploi et de l’Immigration de l’Alberta a découvert de très nombreuses violations des normes du travail. En 2010, après avoir inspecté plus de 400 lieux de travail de migrantes et migrants internationaux, ce ministère a constaté que 74 % des employeurs avaient enfreint la Loi sur les normes d’emploi de la province.
Dans sa récente publication intitulée Le Programme des travailleurs
étrangers temporaires (PTET) canadien : Programme exemplaire…ou erreur ?, le CTC documente de nombreux cas de recours abusif au PTET par les employeurs. Les abus comprennent les suivants :
- salaires impayés ou inférieurs à ceux promis;
- exploitation salariale;
- agression physique et psychologique;
- lourde charge de travail et heures de travail excessivement longues sans période de repos;
- conditions de vie inacceptables;
- confiscation de passeport et restriction des communications.
Les problèmes à ces égards se posent depuis très longtemps et Sheila Fraser, ancienne vérificatrice générale du Canada, a fait remarquer ce qui suit dans le rapport de 2009 issu de son examen du PTET : « on ne fait pas grand-chose pour rectifier les violations commises dans les différentes parties du programme ».
En 2010, le ministre Kenney a annoncé que son ministère dresserait une liste des employeurs n’ayant pas respecté les normes du travail (appelés « employeurs déloyaux ») et qu’il leur interdirait de recourir au Programme.
Malheureusement, et en dépit de nombreux incidents, Citoyenneté et Immigration Canada n’a pas encore inscrit un seul employeur à la liste.
M. Yussuff a fait remarquer ce qui suit : « Il est incroyable que, malgré les constatations du CTC et d’un grand nombre de ses affiliés, sans parler des courageuses travailleuses qui ont signalé de nombreuses injustices en milieu de travail, l’actuel gouvernement n’arrive pas à identifier un seul employeur n’ayant pas respecté nos normes du travail. Il est clair qu’il existe encore un besoin pressant de créer des mécanismes efficaces d’assurance de la conformité, de contrôle et de mise en application de la
loi pour voir à ce que toutes les travailleuses et tous les travailleurs migrants internationaux aient accès aux protections de la législation sur le travail dans leur milieu de travail. »
Barbara Byers, vice-présidente du CTC, en convient et indique une importante mesure que le gouvernement du Canada peut pendre dès maintenant pour protéger un grand nombre de ces travailleuses et travailleurs : la ratification et la mise en œuvre d’une nouvelle convention internationale assurant aux travailleuses et travailleurs domestiques des protections de base en matière de travail.
En juin 2011, le mouvement syndical international, collaborant
étroitement avec des travailleurs et travailleuses domestiques du monde entier, a fait entendre la voix des travailleurs et travailleuses domestiques à l’Organisation internationale du Travail (OIT), qui a adopté une nouvelle convention.
La Convention concernant le travail décent pour les travailleuses et travailleurs domestiques prévoit des normes précises sur le traitement des aides familiaux résidants. Elle donne aux travailleuses et travailleurs domestiques habitant la résidence de leur employeur le droit de créer des syndicats et d’établir des normes sur des sujets tels que les heures de travail, les congés de maternité et le salaire minimum.
Le CTC a financé la participation de femmes à la réunion de l’OIT, y compris quatre militantes canadiennes pour les droits des travailleuses et travailleurs domestiques. « La présence de ces femmes a changé le cours de la discussion », se rappelle madame Byers, « car quand les employeurs et les gouvernements disaient qu’il n’y avait pas de problème dans leur pays, des travailleuses domestiques prenaient le contre-pied en indiquant qu’elles avaient vu de nombreux cas où des personnes venues de leur pays pour travailler dans les pays des employeurs et gouvernements en question avaient fait l’objet de graves abus au travail ».
Bien que l’adoption de la Convention constitue une victoire importante et historique, l’étape suivante consistera à voir à ce que le gouvernement du Canada ratifie la Convention et la mette en œuvre dans le cadre de la législation canadienne sur le travail afin que les 150 000 aides familiales et aides familiaux travaillant au Canada aient accès à ce que le reste du monde a reconnu en tant que droits fondamentaux au travail des travailleuses et travailleurs domestiques.
Le CTC, qui représente plus de trois millions de travailleurs et travailleuses, incite le gouvernement du Canada à ratifier et à mettre en
œuvre la Convention concernant le travail décent pour les travailleuses
et travailleurs domestiques.