Il est temps de mettre les travailleurs et travailleuses au centre des discussions sur les tarifs et le commerce

Il est temps de mettre les travailleurs et travailleuses au centre des discussions sur les tarifs et le commerce

Publié le 11 février 2025 à 16h23 sur Newsweek.com

L’IAM qui compte 600 000 membres et a été pendant des décennies le plus grand syndicat des travailleurs et travailleuses de l’aérospatiale et de la défense aux États-Unis et au Canada, se réjouit que le président Donald Trump ait suspendu sa guerre tarifaire avec le Canada.

L’IAM soutient l’utilisation stratégique des tarifs pour reconstruire l’industrie manufacturière nationale, faire respecter les droits des travailleurs et travailleuses et mettre fin à la fraude commerciale. Cependant, l’imposition de tarifs sur les biens échangés entre les États-Unis et le Canada fera augmenter les prix et nuira à la demande, ce qui entraînera des pertes d’emplois dans plusieurs secteurs des deux pays.

En ce qui concerne le commerce aérospatial entre les États-Unis et le Canada, par exemple, les tarifs proposés de 25 % seraient fatal.

Les tarifs proposés seraient une menace pour les moyens de subsistance et les familles des travailleurs et travailleuses de la fabrication et d’autres secteurs dans l’aérospatiale et la défense dans les deux pays, ainsi que pour l’avenir d’une industrie vitale pour la sécurité nationale, les transports et l’innovation.

Nos membres assemblent des aéronefs civils et militaires, construisent des missiles et des fusées, et fabriquent des pièces et des composants. Ils assurent également la maintenance, la réparation et la révision techniques de ces équipements.

Nos travailleurs et travailleuses ont déjà été durement touchés par des décennies d’accords commerciaux et de politiques déséquilibrés et non appliqués. Nous avons assisté à la délocalisation massive d’emplois vitaux dans l’industrie aérospatiale, en raison de politiques commerciales qui ont traité les travailleurs et travailleuses comme des pions. Des millions d’emplois bien rémunérés et hautement qualifiés aux États-Unis et au Canada ont été transférés dans des pays où les travailleurs et travailleuses ont peu ou pas de droits du travail, ce qui permet de maintenir des salaires bas et des conditions de travail dangereuses.

Les tarifs proposés seraient une attaque directe contre les chaînes d’approvisionnement profondément intégrées qui constituent le pilier de la fabrication aérospatiale. Les conséquences pourraient être dévastatrices : des retards de production et un manque de préparation militaire, des coûts accrus et, surtout, la perte potentielle de milliers d’emplois syndiqués par l’IAM dans l’aérospatiale, la construction navale et la fabrication de matériel de défense aux États-Unis et au Canada.

Pourquoi ? Les industries aérospatiales des États-Unis et du Canada sont étroitement liées. De nombreux aéronefs canadiens contiennent de nombreuses pièces fabriquées aux États-Unis. Les entreprises canadiennes se procurent des composants auprès de grandes entreprises américaines ainsi que de nombreuses petites et moyennes entreprises dans tous les États américains. Cette relation symbiotique signifie également que les entreprises canadiennes de l’aérospatiale et de la défense emploient un nombre important de personnes aux États-Unis.

Imposer des tarifs au Canada perturberait les exportations américaines, briserait des chaînes d’approvisionnement bien établies et nuirait à la compétitivité de nos industries aérospatiales et de défense, au moment même où la Chine réalise des investissements historiques pour développer sa propre capacité aérienne et maritime.

En effet, selon l’Administration du commerce international des États-Unis, le Canada est la deuxième destination des exportations américaines d’aéronefs civils, de moteurs et de pièces, tandis que les États-Unis sont la principale destination des exportations canadiennes dans ce domaine.

Les tarifs dévasteraient une industrie qui contribue pour plus de 874 milliards de dollars à l’économie américaine et près de 30 milliards de dollars au PIB du Canada. Elle soutient également plus de 2 millions de travailleurs et travailleuses américains dans des emplois bien rémunérés, d’une valeur moyenne de 104 577 $ en salaires et avantages sociaux, et 218 000 de ces emplois au Canada.

Les industries aérospatiales et de défense des États-Unis et du Canada sont un rare point lumineux—ensemble, nous exportons plus que nous n’importons. De plus, le commerce des biens entre les États-Unis et le Canada est équilibré si l’on exclut les exportations de pétrole canadien. Ces tarifs pourraient détruire ce succès.

Plutôt que de se lancer dans des guerres commerciales à court terme, nous avons besoin d’une stratégie globale et à long terme qui renforce la fabrication et donne la priorité aux intérêts des travailleurs et travailleuses. Ce répit offre l’occasion aux travailleurs, travailleuses et aux syndicats des deux pays de participer à l’élaboration de ces solutions.

Une nouvelle stratégie nécessite un changement fondamental d’approche.

Nous avons besoin d’un front uni—gouvernement, entreprises, associations industrielles et travail—travaillant ensemble pour forger une politique commerciale qui bénéficie à toutes les parties prenantes. Les travailleurs et travailleuses doivent avoir une voix dans les décisions qui affectent directement leur vie et leurs moyens de subsistance, et ne doivent pas être traités comme des instruments de négociation.

La main-d’œuvre hautement qualifiée et expérimentée de l’IAM a beaucoup à apporter à la création d’une approche gagnante. Nous sommes prêts à engager des discussions significatives avec les dirigeants de nos nations, partager notre expertise et travailler vers des solutions qui garantissent un avenir stable et prospère pour l’aérospatiale, la défense et la fabrication aux États-Unis et au Canada.

Pour défendre nos nations, maintenir notre position mondiale et reconstruire notre capacité de production et nos chaînes d’approvisionnement résilientes, nous devons investir dans la formation des générations futures de travailleurs et travailleuses bien formés.

Il ne s’agit pas seulement de protéger les emplois. L’enjeu est de préserver et de renforcer un secteur critique qui contribue de manière significative aux économies et à la sécurité nationale des États-Unis et du Canada.