La plupart d’entre nous sont aujourd’hui familiarisés avec le concept de transporteur à bas prix (TBP). Pensons à WestJet, Rouge, Southwest, Ryanair…
Au terme d’une période de croissance rapide ayant duré environ 15 ans, les TBP cherchent maintenant à étendre leur territoire pour maintenir leur rythme de croissance passée. Bien qu’ils continuent d’engranger des profits au même titre que d’autres transporteurs aériens, leurs coûts continuent d’augmenter alors qu’ils pénètrent de nouveaux marchés pour y livrer une concurrence aux principaux transporteurs mieux établis.
WestJet a vu le jour comme TBP pour livrer une concurrence principalement au grand transporteur Air Canada (AC) et à d’autres transporteurs incluant Jazz et Air Transat. Le but est de servir les mêmes destinations que ces autres transporteurs.
Aujourd’hui, WestJet est de taille par rapport à Air Canada. Aussi, bien que certains passagers croient qu’il s’agisse d’un TBP, sa tarification est similaire à celle d’autres lignes aériennes canadiennes une fois qu’on comptabilise les autres frais et les déplacements requis pour atteindre la destination finale.
Depuis la création de WestJet, de nouveaux TBP ont vu le jour au Canada. À ce jour, Air Canada a créé Rouge et Westjet, Encore. Encore une fois, le prix des billets d’avion, la fréquence des vols et le confort en cabine ont été réduits tandis que les frais de repas et de bagages ont été majorés pour justifier les baisses de prix. En réalité, les passagers se font « voler » ou « braconner » entre lignes aériennes. Il y a un nombre limité de personnes en mesure de prendre l’avion au Canada et dans d’autres pays.
Les baisses de prix n’ont pas eu pour effet de créer un nouveau public voyageur; elles ont simplement redistribué le public existant. De plus, il y a environ un an, un nouveau transporteur à très bas prix (TTBP) – New Leaf – a vu le jour au Canada. Il ne dessert que sept destinations, tous des aéroports secondaires situés à une certaine distance d’une grande ville canadienne – l’objectif étant de minimiser les coûts dans la plus grande mesure possible.
Maintenant, à la suite de l’annonce récente de la création d’un TTBP par WestJet pour faire concurrence à New Leaf et d’autres TBP et grands transporteurs comme Encore, Rouge, Air Canada et WestJet lui-même, au final, le résultat demeure le même.
Chose intéressante, la semaine dernière, nous avons expérimenté et comparé les tarifs exigés par New Leaf, Air Canada et WestJet pour un vol quittant la région de Toronto à destination de la région de Vancouver, selon les destinations desservies par chaque ligne aérienne. Il s’agissait d’un voyage du 14 au 28 mai avec un bagage enregistré et un bagage à main et avec présélection de siège. Devinez quoi. Les tarifs étaient tous identiques à entre 50 $ et 95 $ près une fois pris en compte les taxes et les frais de bagages. Cependant, les frais additionnels engagés pour se rendre à l’aéroport principal ou au centre-ville au départ et à l’arrivée n’ont pas été pris en compte. Étrangement, c’est Air Canada qui offrait le tarif le deuxième plus bas par une marge de 50 $. WestJet coûtait 95 $ moins cher que New Leaf, qui proposait néanmoins le tarif initial le plus bas, mais n’offrait qu’un vol par jour et ne desservait pas directement les aéroports de Toronto et de Vancouver. Une fois que vous prenez en compte tous les coûts nécessaires pour vous rendre dans chaque ville, l’écart des prix se resserre considérablement.
Les TTBP ont vu le jour pour regagner des parts de marché (des passagers) perdues au profit d’autres TBP et grands transporteurs, pour réduire les coûts et pour exercer des pressions sur d’autres lignes aériennes. Gardons à l’esprit que le Canada est un vaste pays et que son public voyageur est très restreint. Cela représente un problème pour ce pays et ses citoyens.
Qu’est-ce que cela signifie pour les lignes aériennes et les travailleurs aéroportuaires?
Le concept de TBP s’inscrit dans un processus visant à aplanir ou à réduire davantage les coûts futurs engagés par les lignes aériennes elles-mêmes au détriment des passagers. Ce concept déstabilise l’industrie de l’aviation et, surtout, ses travailleurs. Elle crée l’impression auprès des passagers que les coûts sont moins élevés et que les économies potentielles sont élevées grâce à d’astucieuses publicités et insinuations invoquées par l’expression « faible coût ». Cependant, comme le démontre un exemple au hasard, une fois que les prix, le service et les inconvénients sont pris en compte, les prix finissent par s’équivaloir. Bas prix n’est pas nécessairement gage de meilleure valeur!
Donc, du point de vue de quelqu’un qui travaille dans le secteur de l’aviation, la situation est très différente. Comme syndicat, nous nous efforçons d’améliorer les droits, les salaires et les avantages sociaux des travailleurs à l’emploi des lignes aériennes. Nous tentons également de négocier des conditions plus saines et sécuritaires et veillons à maintenir un dialogue social au travail afin que nous puissions tous saisir les enjeux.
Ce qu’il faut aussi garder en tête est le fait que les gains réalisés par les syndicats bénéficient également aux travailleurs non syndiqués qui sont à l’emploi des aéroports ou dont l’emploi gravite autour du secteur aéroportuaire.
Nous devons continuer de composer avec des enjeux environnementaux, une pénurie de main-d’œuvre qualifiée, des salaires très bas ici même au Canada, des préoccupations concernant l’infrastructure d’aviation comme celles soulevées dans le rapport Emerson, des lois hostiles aux travailleurs et des pavillons de complaisance. Tout cela résulte de l’essor rapide de la mondialisation.
L’objectif que poursuit l’AIM est de créer des emplois bien rémunérés et assortis d’avantages sociaux adéquats. Pensons notamment à la campagne « Lutter pour 15 $ et Justice ». Nous travaillons continuellement à négocier des améliorations aux droits des travailleurs et à faire la promotion d’un dialogue social, comme mentionné précédemment, pour que nous puissions ensemble travailler plus efficacement à améliorer notre qualité de vie.
Les transporteurs à très bas prix sont nuisibles et nous détournent de l’atteinte de nos objectifs tout en semant la confusion au sein du public voyageur, qui vient à croire qu’ils sont bons pour l’industrie canadienne du transport aérien.
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