Toronto, ON – Les pressions en faveur de services accru, la privatisation des aéroports et les droits du syndicat successeur en cas de roulement de contrat sont des domaines qui représentent de graves préoccupations pour les plus de 6 000 agents et agentes de contrôle de sécurité préalable à l’embarquement qui travaillent dans les aéroports. Ces questions figurent parmi les priorités inscrites à l’ordre du jour d’une rencontre avec le ministre des Transports Marc Garneau et la ministre du Travail Patty Hajdu demandée par l’Association internationale des machinistes et des travailleurs de l’aérospatiale (AIM) et le Syndicat des Métallos (USW).
Les deux syndicats représentent plus de 90 p. 100 de la totalité des agents et agentes de contrôle de sécurité préalable à l’embarquement dans les aéroports au Canada.
Les préoccupations sont issues d’une conférence tenue à Ottawa en septembre qui a rassemblé une soixantaine d’agents et agentes de sûreté provenant de plus de 20 aéroports à l’échelle du Canada afin de discuter des problèmes qui surviennent dans leur milieu de travail.
Le plus grand sujet de préoccupation était l’augmentation du nombre de passagers et le manque de financement pour répondre à la demande. « Les niveaux de dotation n’ont tout simplement pas augmenté suffisamment pour suivre le rythme du nouveau nombre de passagers », explique Carlos DaCosta, coordonnateur canadien des lignes aériennes canadiennes pour l’AIM. Le nombre de passagers canadiens augmente en moyenne de 2,5 à 3,5 p. 100 d’une année à l’autre. Le nombre de passagers prévu d’ici la fin de l’année sera de 61 millions de personnes, soit une hausse par rapport aux 47 millions de passagers à la fin de 2011. « En 2010, nous avions 6 790 agents et agentes de sûreté et en 2016, il n’en restait qu’à peine un peu plus de 6 000 », déplore M. DaCosta. « Sans l’ajout de nouveaux agents et agentes de contrôle de sécurité préalable à l’embarquement, les files d’attente ne feront qu’augmenter, de même que la frustration des passagers et, par le fait même, les injures à l’endroit des agents et agents, et cela augmente le risque que des passagers ne soient pas soumis à un contrôle de la sécurité adéquat avant de prendre l’avion en raison des pressions imposées pour atténuer les files d’attente. »
La deuxième préoccupation concerne la privatisation des aéroports. L’AIM a clairement établi qu’elle s’oppose catégoriquement à la conversion de nos aéroports d’un modèle sans but lucratif à un modèle à but lucratif. Cela est illogique à la lueur des données que nous avons provenant d’autres aéroports dans le monde entier qui ont choisi d’opter pour le modèle à but lucratif. La structure des coûts pour les passagers est à la hausse et la sécurité d’emploi pour les travailleurs dans les aéroports est à la baisse.
La dernière préoccupation est la question relative à la succession lorsque l’entreprise chargée des services de sécurité dans les aéroports change de mains. C’est l’ACSTA qui embauche les entreprises de sécurité actuelles à l’échelle du Canada à contrat à la suite d’un processus de demande de propositions et le contrat parvient à échéance en 2022. À l’heure actuelle, les dispositions fédérales sur le travail permettent qu’en cas de changement d’entreprise de sécurité, les droits de négociation et la convention collective ne survivent pas au nouvel entrepreneur. Cette situation est survenue en 2011, obligeant les syndicats à abdiquer, à resyndicaliser et à renégocier les conventions collectives, créant ainsi une énorme instabilité dans le secteur pour les employeurs, pour l’ACSTA et pour les travailleurs. Une simple modification du Code du travail en ce qui a trait aux droits du successeur résoudrait le problème. Tous ces points ont été couverts dans des lettres à l’intention des deux ministres envoyées le 8 novembre 2017 et nous attendons leur réponse à nos demandes de rencontres.
Le 8 novembre 2017
Par courriel : marc.garneau@parl.gc.ca
L’honorable Marc Garneau
Ministre des Transports
Chambre des communes
Ottawa (Ontario) K1A 0A6
Par courriel : patty.hajdu@parl.gc.ca
L’honorable Patty Hajdu
Ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et du Travail
Chambre des communes
Ottawa (Ontario) K1A 0A6
Monsieur, Madame,
Récemment, l’Association internationale des machinistes et des travailleurs de l’aérospatiale (AIMTA) et le Syndicat des Métallos (Métallos) ont tenu une conférence nationale conjointe à l’intention des agents de contrôle préembarquement aux aéroports canadiens. Ensemble, nos deux syndicats représentent près de 6000 agents de contrôle préembarquement, soit plus de 90 % de tous les agents de contrôle au Canada. Nous représentons les agents des villes de Vancouver, de Toronto, d’Ottawa, de Montréal et d’Halifax, pour n’en citer que quelques-unes.
La conférence a réuni plus de 60 agents de contrôle de près de 20 aéroports afin qu’ils puissent discuter des enjeux liés à leurs lieux de travail. Au cours de la conférence, nous avons eu le plaisir d’assister à des présentations de Transports Canada et de l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien (ACSTA).
Par la présente, nous désirons vous faire part des préoccupations que les agents de contrôle préembarquement ont soulevées et qu’ils considèrent très importantes, notamment : l’accroissement du nombre de passagers et le sous-financement s’y rapportant, la privatisation des aéroports et les droits et obligations du successeur lors de changement de fournisseurs.
Notre principale préoccupation demeure les pressions accrues que subissent nos membres relativement aux services et qui découlent de l’accroissement du nombre de passagers et du temps d’attente. Vous savez sans doute que les niveaux de passagers ont augmenté de 2,5 % à 3,5 % en moyenne sur douze mois. Par conséquent, à la fin de 2016/2017, on s’attend à ce que le nombre de passagers s’élève à 61,8 millions de personnes, une hausse par rapport aux 47,7 millions en 2010/2011. D’ici 2036, le nombre de passagers à l’échelle mondiale doublera quasiment, passant d’environ quatre milliards cette année à 7,8 milliards, selon l’Association du transport aérien international (ATAI). Tout indique que la demande de connectivité mondiale continue de croître, et le monde doit se préparer à ce que le nombre de passagers double au cours des deux prochaines décennies, comme l’a indiqué l’ATAI.
Au Canada, le public voyageur fait face à des temps d’attente plus longs aux aéroports lors des périodes de pointe et les agents de contrôle préembarquement vivent cette réalité chaque jour. Les niveaux de dotation en personnel n’ont tout simplement pas augmenté suffisamment pour répondre à la hausse de l’achalandage. En 2010, il y avait 6790 agents de contrôle, et en 2016, il y en avait un peu plus de 6000. Sans l’ajout d’agents de contrôle préembarquement, les temps d’attente continueront de s’accroître, tout comme le risque que les passagers ne fassent pas l’objet d’un contrôle adéquat avant l’embarquement. Il s’agit là d’une question de sécurité sur laquelle nous devons nous pencher, car elle s’aggravera chaque année à mesure que le nombre de passagers augmentera.
Une grande partie du problème réside dans le fait que le gouvernement fédéral continue de sous-financer la sûreté aéroportuaire. En 2015/2016, le gouvernement fédéral a perçu 721 millions de dollars en droits pour la sûreté du transport aérien (DSTA). Pourtant, l’ACSTA n’a reçu que 678,4 millions de dollars en 2015/2016, ce qui signifie que 42,6 millions sont passés au gouvernement fédéral et non pas à la sûreté aéroportuaire. Ces fonds devraient servir à s’assurer que les agents de contrôle préembarquement puissent faire face aux pressions accrues relatives aux services.
La deuxième préoccupation soulevée à la conférence est la privatisation des aéroports. Cette question inquiète non seulement les agents de contrôle préembarquement, mais aussi les autres travailleuses et travailleurs aux aéroports, et les passagers. À l’heure actuelle, grâce au modèle « sans but lucratif » en place, les aéroports sont gérés efficacement, mais nous comprenons que certaines inquiétudes concernant les lois doivent être étudiées.
Cependant, il n’est pas logique de transformer ce modèle en un modèle privé à but lucratif, compte tenu de l’information que nous possédons sur d’autres aéroports dans le monde qui sont passés à un modèle « à but lucratif ». Que nous prenions l’Australie ou le Royaume-Uni comme exemple, les résultats sont clairs en ce sens que les coûts aéroportuaires ont augmenté et sont répercutés sur les compagnies aériennes et finalement les passagers.
Au Canada, nous savons de première main que notre structure de coûts est déjà élevée et que de nombreux passagers traversent la frontière dans le but d’utiliser des compagnies aériennes américaines en raison de leurs faibles tarifs, qui résultent d’une structure de coûts plus avantageuse. Nous ne devrions pas aggraver la situation en permettant à la structure de coûts d’augmenter en transformant les aéroports en des modèles « à but lucratif ».
Plus tôt cette année, l’AIMTA a rencontré le secrétaire parlementaire de la ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et du Travail, Roger Cuzner, afin de lui présenter un bref exposé sur cette même question, et notamment sur le roulement des contrats. Cependant, les deux syndicats accueillent favorablement l’occasion de vous rencontrer conjointement à l’avenir en vue de discuter plus en profondeur de ces nouvelles préoccupations évoquées dans la présente.
Finalement, nous savons que la majorité des grandes compagnies aériennes au Canada, notamment Westjet, Air Canada et Air Transat, de même que de nombreuses administrations aéroportuaires comme Vancouver, Calgary et Ottawa, ne sont pas favorables à la privatisation des aéroports pour les raisons mêmes que nous avons citées ci‑dessus.
La troisième préoccupation à l’égard de laquelle il est urgent d’agir est la question des droits et obligations du successeur lorsqu’un contrat de services de contrôle est octroyé à un autre fournisseur. Comme vous le savez probablement, à l’heure actuelle, les fournisseurs de services de contrôle partout au pays obtiennent des contrats auprès de l’ACSTA par l’entremise d’un processus de demande de propositions (PDP), lequel régit la fourniture des services de contrôle dans les aéroports canadiens et prendra fin en 2022. Toutefois, nous comprenons qu’il soit possible, à ce moment-là, que les contrats fassent de nouveau l’objet d’appels d’offres, compromettant encore une fois le gagne-pain des travailleuses et travailleurs.
Présentement, le droit du travail fédéral stipule que dans l’éventualité d’un changement de fournisseur de services de contrôle, le nouveau fournisseur n’a aucune obligation de respecter les droits de négociation et la convention collective existants. C’est exactement ce qui s’est produit en 2011. Chaque syndicat représentant les agents de contrôle préembarquement avait été obligé de resyndiquer tous les travailleurs et de renégocier leurs premières conventions collectives avec le nouveau fournisseur de services de contrôle.
Cette situation crée beaucoup d’instabilité dans le secteur pour les employeurs, l’ACSTA et la main-d’œuvre. De plus, il n’est pas logique sur le plan des relations de travail que chaque fois qu’un contrat est octroyé à un autre fournisseur, ces mêmes travailleurs doivent se resyndiquer et négocier de nouvelles conventions collectives. Le gouvernement, les employeurs et les travailleurs devraient jouir de la certitude que leurs relations de travail se poursuivront à l’avenir.
Heureusement, il est possible de résoudre facilement ce problème. Il suffirait d’apporter une simple modification au Code canadien du travail afin d’y prévoir les droits et obligations du successeur dans le secteur des contrats de service. Le gouvernement libéral de l’Ontario a proposé une telle modification à sa Loi sur les relations de travail et on s’attend à ce qu’elle soit adoptée sous peu. Le temps est venu pour le gouvernement fédéral de faire de même.
Ce sont les trois préoccupations que la conférence a soulevées et, à notre avis, que le gouvernement fédéral peut et doit examiner le plus rapidement possible.
Nous serions heureux de vous rencontrer pour discuter plus à fond de ces préoccupations.
Le vice-président général du Canada, Le directeur national pour le Canada,
Association internationale des machinistes, Syndicat des Métallos,
Stanley Pickthall Ken Neumann
c.c. : Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités