Par Bill Trbovich – directeur des Communications de l’AIM pour le Canada
Toronto, ON – Le Canada et les États-Unis se partagent la plus longue frontière non défendue au monde entre deux pays, soit quelque 8 891 kilomètres (5 525 milles), qui touche quatre des Grands Lacs, huit provinces et 13 états. Nous parlons la même langue, l’anglais, bien que la seconde langue officielle du Canada soit le français. Nous avons une devise semblable, bien que le dollar américain valle un peu plus que le nôtre. Nous partageons également le désir de travailler avec acharnement, de gagner un salaire décent, de respecter notre lieu de travail et d’être en mesure de redonner à notre collectivité respective tout en étant en mesure de profiter de sa retraite en toute dignité. Depuis 1890, nous partageons également un grand syndicat qui rend tous ces désirs possibles : l’Association internationale des machinistes (AIM).
À une époque où l’isolationnisme et l’individualisme sont à la hausse, alors que certains dirigeants syndicaux ciblent les syndicats internationaux en s’enveloppant dans le drapeau de leur pays dans un effort visant à diviser, conquérir et absorber nos membres pour leur propre profit, l’AIM se tient debout.
Personne ne connaît mieux la valeur d’un syndicat international que Dave Ritchie, qui a récemment pris sa retraite après avoir été membre de l’AIM pendant 42 ans et vice-président général canadien pendant plus de 20 ans. « La capacité de négocier, de représenter, de faire du lobbying, de provoquer le changement et de créer et maintenir des normes dans nos propres pays tout en améliorant celles d’autres pays est possible, parce que nous appartenons à un syndicat international », explique M. Ritchie. « Nous continuerons de prospérer, à condition de le faire main dans la main. Vous pouvez être un fier syndicat canadien ou un fier syndicat américain et être quand même un syndicat international parce que nous faisons partie du mouvement ouvrier, qui fait partie d’un portrait plus global. »
Le Canada est non seulement un pays distinct, mais aussi un territoire distinct au sein de la structure de l’AIM et il est dûment reconnu comme tel. Les membres canadiens élisent non seulement le président international et le secrétaire-trésorier général, ils élisent aussi leur propre vice-président général (VPG) canadien, qui siège au sein du conseil exécutif du syndicat. « Nous avons plusieurs éléments en commun avec nos consœurs et confrères américains, mais nous avons une autonomie canadienne en ce qui a trait aux enjeux canadiens », explique Stan Pickthall, notre VPG actuel.
« Gérer un syndicat coûte cher et faire partie d’un syndicat international rend plusieurs choses possibles », déclare M. Pickthall. « Nous avons 40 000 membres au Canada et 65 sections locales et plus de moitié d’entre elles comptent 200 membres ou moins, alors faites le calcul. À elles seules, elles ne sont pas en mesure de se permettre des avocats pour combattre les griefs et les arbitrages, ne sont pas en mesure d’envoyer des membres ailleurs pour qu’ils puissent obtenir de la formation et ne sont pas en mesure de se permettre leurs propres services de communication, de TI ou de comptabilité non plus. Mais en faisant partie d’un syndicat international, nous sommes plus grands que la somme de chacune de nos composantes. »
« Nous avons les meilleures installations de formation que l’argent peut acheter parce que nous sommes un syndicat international », explique M. Ritchie. Vous ne pouvez pas vraiment attribuer une valeur monétaire à la qualité de l’enseignement offert aux membres canadiens par l’AIM au William W Winpisinger Education Centre (Centre W3) à Hollywood, Maryland, au sud de Washington, DC. Les Canadiens peuvent se joindre à leurs consœurs et confrères américains pour apprendre conjointement des choses comme la négociation collective, les préparatifs à la négociation, la première convention collective, la syndicalisation 1 et 2, la production de sites Web, les techniques de communication comme la rédaction de bulletins d’information, le leadership 1 et 2 en anglais, en français et en espagnol, la formation du formateur, qui perfectionne nos futurs dirigeants et bien plus encore. Compte tenu du fait que les lois du travail américaines sont souvent radicalement différentes de celles du Canada, que plusieurs cours sont offerts à un mélange de membres américains et canadiens et que nous apprenons les uns des autres, les différences législatives deviennent un avantage, et non un obstacle. Cela est non seulement avantageux pour apprendre les nuances de la négociation collective et de la première convention collective, mais nos expériences conjointes aident dans les campagnes de syndicalisation des deux côtés de la frontière.
L’AIM est le plus grand syndicat dans le secteur du transport aérien dans les deux pays. En tant que syndicat international, l’AIM a beaucoup de poids dans l’industrie du transport aérien. Quels éléments qui fonctionnent bien pour nos membres chez Air Canada peuvent également profiter à nos membres qui travaillent pour Southwest ou American Airlines, par exemple? L’échange d’information entre les membres américains et canadiens concernant le transport aérien a contribué à la formation de contrats de travail devenus la norme de l’industrie non seulement en Amérique du Nord, mais partout dans le monde.
L’AIM est membre de la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF). Pourquoi est-ce important pour nos membres? L’ITF est un organisme qui surveille l’aviation, le transport ferroviaire, les pêches, le transport routier, le transport urbain et la navigation intérieure. L’AIM représente non seulement les travailleurs du transport aérien, mais elle est également le plus grand syndicat dans le domaine de l’aérospatiale des deux côtés de la frontière; nous ne nous intéressons donc pas uniquement aux compagnies aériennes, mais aussi aux avions utilisés par ces compagnies aériennes. Nous représentons également le plus grand fabricant d’autobus des deux côtés de la frontière et obtenir des commentaires mondiaux sur le transport routier, autant dans les secteurs urbains qu’à l’extérieur de ceux-ci, confère donc un avantage à nos membres. Cela ne serait pas possible si nous ne faisions pas partie d’un syndicat international.
« Parce que nous profitons du fait que l’union fait la force, nous avons la capacité physique et financière de rencontrer d’autres organisations syndicales dans le monde entier pour partager nos idéaux », soutient Carlos DaCosta, coordonnateur canadien des lignes aériennes pour l’AIM. « Un syndicat international peut apporter plus de poids en ce qui a trait à divers enjeux dans les domaines du transport aérien, ferroviaire et urbain en vertu de notre adhésion à des organismes comme l’ITF à titre de membre. Nous pouvons provoquer des changements là où ce serait impossible si nous agissions de façon isolée. »
« Nous avons tous entendu parler de l’économie mondiale et dans les domaines de l’aérospatiale et du transport aérien, nous nous heurtons constamment à l’influence des sociétés internationales et la meilleure façon de combattre cela est d’appartenir à un syndicat international et à des organismes comme l’ITF », a déclaré M. Da Costa. « Si nous savons ce que fait Swissport en Europe par exemple, nous pouvons mieux déterminer s’il s’agit d’une tendance qui aura éventuellement des répercussions en Amérique du Nord et, à la limite, sur nos membres. Nous utilisons la recherche de l’ITF sur des questions comme la fatigue des travailleurs et le changement technologique. Nous prenons cette information et nous l’intégrons à notre négociation collective pour préparer nos membres pour l’avenir, ce qui profite à notre syndicat des deux côtés de la frontière. »
L’action politique est un autre domaine dans lequel l’appartenance à un syndicat international a ses avantages. Nos consœurs et confrères américains ont été jusqu’à récemment les plus actifs sur le plan politique. Mais le programme de droite s’est étendu de l’autre côté du 49e parallèle avec l’élection de Stephen Harper et de son parti Conservateur en 2005. Au cours de la décennie suivante, les travailleurs Canadiens ont souffert de l’érosion continue des droits et libertés en raison des lois idéologiques du gouvernement conservateur. La seule façon de se débarrasser d’un intimidateur est de lui tenir tête et, sous la direction de Gord Falconer, qui était alors le représentant de la Grande loge (RGL) responsable de l’action politique, le territoire canadien a tenu son premier Symposium de l’action politique au Centre W3 en 2014. Sans que cela arrive du jour au lendemain, même si cela nous a semblé le cas, les sections locales canadiennes ont créé des comités d’action politique et l’AIM au Canada a commencé à développer sa masse musculaire politique. En 2015, nous avons réalisé l’un de nos objectifs en évinçant les Conservateurs du pouvoir et en mettant fin à une décennie d’oppression. « Nous avons atteint un de nos objectifs et, ce faisant, nous avons lancé l’avertissement que nous ne nous arrêterons pas tant que nous n’aurons pas atteint notre deuxième objectif, soit la formation d’un gouvernement néo-démocrate à Ottawa », lance M. Falconer, aujourd’hui chef du personnel. « Nous avons observé à quel point le lobbying de nos consœurs et confrères américains peut faire une différence et nos membres commencent à en profiter. Nous devons rappeler à nos membres que les politiciens ne sont que des personnes ordinaires comme eux et qu’ils doivent être informés du point de vue du syndicat sur les enjeux et la meilleure façon de le faire est du lobbying face à face. »
Au début de 2016, l’AIM a fourni le plus imposant contingent appelé à participer à une campagne de lobbying parrainée par le Congrès du travail du Canada auprès des trois partis sur la Colline du Parlement. « Nous ne sommes pas le plus important syndicat au Canada, mais nous pouvons jouer dans la cour des grands », affirme fièrement Stan Pickthall. « Après deux jours, les politiciens savaient qui étaient les Machinistes et nous avons rappliqué plusieurs fois depuis. Nous avons atteint certains de nos buts et, surtout, nos membres voient l’utilité de l’action politique. »
Une des marques de commerce des Machinistes est le service à la collectivité et les membres au sud de la frontière n’ont pas hésité à faire preuve de générosité pour aider leurs consœurs et confrères canadiens à Fort McMurray, Alberta au printemps 2016. Un feu de forêt s’étendant sur une superficie équivalente à celle des états du Maryland, du Delaware et de la Pennsylvanie, a balayé le nord de l’Alberta et certaines parties de la Saskatchewan, la province voisine. Il a forcé l’évacuation de Fort McMurray et des collectivités adjacentes, ce qui représente quelque 88 000 personnes au total, plusieurs d’entre elles des membres de l’AIM. Plus de 2 400 résidences ont été détruites et cela a pris plusieurs mois avant que les gens puissent réintégrer leur foyer. Parce que l’AIM est un syndicat international, nous avons pu puiser dans notre Fonds de secours en cas de catastrophe pour aider les membres de l’AIM touchés par l’incendie. Plus de 100 000 $ ont été remis aux membres pour les aider dans leur rétablissement et les dons recueillis auprès des sections locales à l’échelle de l’Amérique du Nord ont dépassé l’objectif de réunir une somme équivalente et leur ont remis un montant supplémentaire encore plus élevé. Les membres canadiens de l’AIM ont répondu à l’appel qui leur a été lancé durant l’été 2017 pour porter secours aux membres américains de l’AIM au Texas qui ont été victimes de l’ouragan Harvey . Sans un syndicat international, ces fonds ne seraient pas disponibles.
Donc, la prochaine fois que quelqu’un mettra en doute l’utilité d’appartenir à un syndicat international, je laisserai Dave Ritchie répondre à ce questionnement. « Dénoncer les syndicats internationaux au profit des syndicats nationaux divise l’opinion au sein du mouvement syndical et vous devez regarder les avantages du portrait global », explique-t-il. « Nous parlons de normes et de règles du jeu équitables, un syndicat international permet d’obtenir ces deux éléments en même temps. » Un syndicat. Une voix. Une AIM.