Fort McMurray, AB – Le 1er mai 2016, un feu de végétation s’est déclaré au sud-ouest de Fort McMurray (Alberta), 434 kilomètres au nord-ouest d’Edmonton. Dès le 3 mai, ce feu a ravagé la communauté, détruisant sur son passage 2 400 maisons et bâtiments, dont au moins 50 appartenaient à ou étaient loués par des membres des sections locales 99 et 1722 de l’AIM. S’est ensuivie la plus importante évacuation de personnes dans l’histoire de l’Alberta. En effet, plus de 88 000 résidents de Fort McMurray ont été forcés de fuir la ville.
Plus de 600 membres de l’AIM, dont 300 résidents permanents et d’autres qui s’y rendaient chaque semaine ou parfois tous les jours pour travailler, ont été touchés. Ces membres travaillent pour des entreprises comme Finning International, Kal Tire, Strongco Equipment et Leavitt Machinery. Ils assurent la révision générale, la réparation et l’entretien de l’équipement lourd utilisé dans l’industrie du pétrole. Un quart de la production canadienne de pétrole – soit un million de barils par jour – est extrait des sables bitumineux autour de Fort McMurray.
Des gens ont été déracinés de leur milieu, parfois deux fois plutôt qu’une. Ils ont perdu tout ce qu’ils possédaient : leur maison a été rasée et leurs véhicules ont été incendiés. Une fois évacués, plusieurs ont trouvé refuge chez des membres de la famille, des amis ou des collègues de travail, tandis que d’autres ont été accueillis par de parfaits étrangers. C’est ainsi que la solidarité se manifeste au Canada.
Des membres de l’AIM ont réservé une réponse rapide et réconfortante à l’appel lancé au nom des sinistrés. « La générosité et le soutien dont j’ai été témoin depuis avoir accepté la fonction de coordonnateur du comité de secours aux sinistrés s’avèrent tout simplement extraordinaires, explique Shawn Plouffe, secrétaire archiviste de la section locale 99 de l’AIM. J’ai reçu des courriels de membres ayant tout perdu dans lesquels ils me demandent comment ils peuvent venir en aide à d’autres ayant encore moins de ressources qu’eux. C’est la solidarité syndicale à son meilleur. »
Soutien exceptionnel
« Nos membres ont apporté un soutien financier et moral exceptionnel à leurs confrères et consœurs de Fort McMurray, affirme Bob McKinnon, agent d’affaires directeur du district 14 de l’AIM. Personne n’a hésité. Nos membres à Fort McMurray avaient besoin d’aide et leur appel fut entendu : vêtements, nourriture, logement, argent – on n’a manqué de rien. Et nos membres continueront d’être généreux tant et aussi longtemps que des besoins se feront sentir. »
David Hyde, un pompier volontaire et mécanicien de machinerie lourde à l’emploi de Finning International, membre de la section locale 99, a hébergé deux de ses voisins dans des caravanes installées dans l’entrée de cour de sa demeure de Saprae Creek après le début des incendies. Et ils y sont toujours! Le technicien d’équipement lourd Duane Brooks, membre de la section locale 99, a pris sa retraite deux semaines avant le début des feux. Moins de deux jours après le début de la catastrophe, il était à Lac LaBiche pour installer des génératrices et des caravanes pour les évacués afin qu’ils aient un endroit où rester. Partout où la catastrophe avait frappée, des membres des sections locales 99 et 1722 étaient présents pour prêter main forte aux sinistrés.
La Grande loge de l’AIM a versé un don de 50 000 $ au fonds d’aide aux sinistrés mis sur pied par le district de l’AIM, et la section locale 99 de l’AIM a fait don du même montant. Depuis, les dons affluent de partout au pays : le Conseil des Machinistes du Québec a versé 2 500 $, le Conseil provincial des Machinistes de l’Ontario a levé plus de 1 200 $ pendant son récent congrès et la section locale 2921 de l’AIM, qui représente les agents de contrôle de l’aéroport Pearson à Toronto, a placé la barre haut en amassant 7 000 $ par la vente de produits de boulangerie aux aérogares 1 et 3. Leur employeur, Garda Canada, a égalé ce montant, pour un don totalisant 14 000 $. Il va sans dire que les Machinistes ont un grand cœur et les poches profondes alors que les besoins en Alberta sont criants.
Au début de juin, les résidents ayant la chance d’avoir encore une maison à laquelle retourner ont pu réintégrer leur domicile. Cependant, le sort de milliers d’autres demeure incertain à ce jour. Plusieurs éprouvent encore trop de peine pour en parler, mais cinq membres de l’AIM ont accepté de parler de ce qu’ils ont vécu. Leurs histoires suivent.
Shane Ganong
« Je travaillais sur un camion dans mon garage. Quand j’ai regardé dehors, ma rue était en feu. Je n’en croyais pas mes yeux », explique Shane Ganong, membre de la section locale 99 de l’AIM. Il habitait le quartier Waterways, situé au bas de la côte menant à Fort McMurray. « Le haut de la colline était enveloppé d’une épaisse fumée moire. Les flammes derrière ce mur de fumée étaient rouges et oranges et jetaient une lueur rouge sur tout. Le feu s’est mis à déferler la côte vers ma maison, alors je savais qu’il ne me restait pas beaucoup de temps. »
Shane n’a pas eu à s’inquiéter pour son épouse et leurs deux filles, car elles étaient en visite à l’extérieur de la ville. Il a néanmoins dû agir rapidement. « J’ai pris un sac à ordures et je l’ai rempli de quelques vêtements, nos passeports et une enveloppe remplie d’argent [le produit de la vente récente d’un camion] ». Puis, il a laissé sa demeure à son sort.
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David Hyde
David Hyde avait déjà accumulé 80 heures de travail comme mécanicien d’équipement lourd itinérant pour Finning International lorsqu’il a été appelé en service le 3 mai. Hyde est aussi pompier volontaire pour le service d’incendie de Saprae Creek.
« J’ai perdu une remise, mais ma maison a été épargnée par l’installation de gicleurs sur le toit. Cependant, 30 % des maisons dans cette communauté n’ont pas eu la même chance », explique Hyde. Le feu, alimenté par des vents de 72 km/h, rasait une superficie de trois kilomètres carrés chaque heure. « La chaleur et les flammes étaient intenses et les vents n’arrêtaient pas de changer de direction. On réussissait à contenir les flammes à un endroit, puis les vents poussaient le feu vers un autre bâtiment ou même de l’autre côté de la rue. Je n’ai jamais eu à combattre un incendie aussi intense que celui-là. »
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En date du 6 mai, le feu avait détruit 12 structures dans le hameau d’Anzac, situé à 36 kilomètres au sud-est de Fort McMurray. Dans le quartier d’Abasand, 50 % des maisons ont été détruites. À Beacon Hill, ce sont 70 % des maisons qui ont été rayées de la carte. North Parsons a perdu une école en construction. Tandis qu’à Saprae Creek, 30 % des maisons ont été rasées. Wood Buffalo a perdu 30 maisons, Waterways, 90 % de ses maisons et Stoney Creek (encore considérée comme une zone de feu active), 70 maisons.
Kyle Hepditch
Pour Kyle Hepditch, un mécanicien d’équipement lourd de 26 ans à l’emploi de Levitt Machinery, marié et père d’un bébé de six mois, le feu a eu un double impact. La maison qu’il louait a été consommée par le feu et la famille a perdu tout ce qu’elle possédait. Il a subi le deuxième impact lorsque son employeur a refusé de le rapatrier à Fort McMurray. Levitt Machinery lui a plutôt offert un emploi à Edmonton, où il loue actuellement une maison, mais gagne un salaire moins élevé. (En effet, les mécaniciens d’équipement lourd en poste à Edmonton gagnent moins que leurs homologues à Fort McMurray.) « C’est assez difficile au départ de tout perdre, mais là, ils refusent de me retourner à Fort McMurray et ont même affiché mon ancien poste! »
Lorne Park
Tout comme Hepditch, Lorne Park est membre de l’AIM et résident de Beacon Hill, le quartier adjacent à l’autoroute 63, la seule route permettant d’entrer à Fort McMurray et d’en sortir. La maison de Lorne a été épargnée, mais il ne peut pas la réintégrer.
« Les terrains autour de ma maison sont lourdement contaminés par les produits toxiques ayant brûlé pendant l’incendie, explique-t-il. La meilleure évaluation quant à une éventuelle réintégration du quartier nous mène à septembre, mais personne ne semble encore en avoir la certitude. »
Lorne et son épouse ont un jeune garçon autiste, et le bien-être de ce dernier est leur principale préoccupation. « Nous avons eu la chance d’avoir pu trouver une maison à louer dont le plan d’étage est similaire à celui de la maisons que nous occupions. Par conséquent, il ne s’est pas vraiment rendu compte que sa routine avait été bouleversée. » Dans le quartier Beacon Hill, 70 % des maisons ont été détruites et certains avancent que le quartier au complet devra être rasé.
Paul Mandryk
Paul Mandryk est propriétaire d’une maison à Edmonton et loue une demeure à Fort McMurray, où il travaille pour Finning International. Comme bon nombre des autres membres de la section locale 99, il travaille par périodes échelonnées. Souvent, il travaillera deux semaines et aura deux semaines de congé par la suite. « L’incendie m’a dérobé de tout ce que je possédais à Fort McMurray : vêtements, meubles et autres objets personnels. »
« J’ai néanmoins eu de la chance, car ma maison est intacte. »
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Les évaluations initiales des indemnités d’assurance totalisent jusqu’à 9 milliards de dollars canadiens dans le scénario où toute la collectivité doit être rebâtie. Une deuxième évaluation, établie sur la base des dommages constatés à ce jour, fixe les coûts à entre 2,6 et 4,7 milliards de dollars canadiens, tandis que la perte de production de pétrole coûte quelque 70 millions de dollars par jour à l’économie albertaine. Au total, on estime que ces feux auront coûté 1 milliard de dollars canadiens à l’économie de la province. Les membres ayant été touchés par les incendies de forêts sont encouragés à demander une aide financière du fonds en s’adressant à la section locale 99 ou au district 14. Les membres concernés peuvent être admissibles à une aide totale de 500 $, mais ils doivent en faire la demande.