Washington, DC – Bien que le président Donald Trump exige que le Canada démantèle son système de gestion de l’offre des produits laitiers sous peine de compromettre notre partenariat commercial et que ses conseillers aient réservé une place bien spéciale en enfer à notre premier ministre à la suite de ses commentaires au récent Sommet du G7, le Canada n’a pas mordu à l’hameçon!
« Je n’ai pas voté pour Justin Trudeau aux dernières élections et nos politiques sont souvent à des pôles opposés, mais je l’applaudis, de même que ses ministres, pour la façon dont ils ont répondu aux tactiques d’intimidation de M. Trump », déclare le vice-président général canadien de l’Association internationale des machinistes (AIM) Stan Pickthall. « On ne s’en prend pas à son allié et partenaire commercial le plus proche en lançant des insultes à son chef juste pour avoir l’air d’un dur à cuire auprès d’un dictateur nord-coréen. L’enjeu est trop grand pour les travailleurs et travailleuses des deux côtés de la frontière pour poursuivre ces acrobaties diplomatiques. »
Trump a d’abord imposé des tarifs de 25 p. 100 sur l’acier canadien et de 10 p. 100 sur les importations d’aluminium canadien. Le Canada a répondu qu’il ferait la même chose en nature sur divers biens produits aux États-Unis à compter du 1erjuillet. M. Trump a ensuite exigé que nous démantelions notre système de gestion de l’offre des produits laitiers sous peine de représailles. Il jouait le grand jeu auprès des producteurs laitiers du Wisconsin qui l’ont élu. Le Canada a déclaré qu’il défendra les politiques agricoles actuelles de notre pays et qu’il appuierait fermement le système actuel qui emploie des quotas pour contrôler la quantité de produits laitiers produits par les exploitants agricoles afin de s’assurer que notre offre nationale correspond à la demande prévue. C’est une façon d’éviter les excédents et les pénuries, qui contribue également à stabiliser le revenu des exploitant agricoles. Les Producteurs laitiers du Canada ont déclaré que bien que la population canadienne jouisse d’une offre et de prix stables, le marché américain est vulnérable aux excédents imprévus de produits, ce qui fait baisser les prix pour les exploitants agricoles et perturbe le marché pour les consommateurs.
À la suite de la Conférence des dirigeants et dirigeantes du G7 tenue récemment au Québec, M. Trudeau a réitéré son message au sujet des droits de douanes imposés sur l’acier et l’aluminium, c’est-à-dire que le Canada ne se laisserait pas intimider. Cela a incité M. Trump à écrire sur Tweeter que M. Trudeau était très malhonnête et faible.
Mais M. Trudeau est resté bien campé sur sa position et il est largement soutenu par les politiciens canadiens de toutes allégeances, et même par des politiciens américains! Le sénateur John McCain a écrit sur Tweeter que les Américains appuient le Canada même si ce n’est pas le cas du président. Le sénateur Bob Corker, président républicain du comité sénatorial des relations étrangères, a déclaré qu’il ne fait aucun doute que M. Trump a terni les relations avec le Canada. « Le Canada n’est pas un pays avec lequel nous avons des problèmes commerciaux », explique-t-il.
La meilleure réponse aux tactiques d’intimidation de M. Trump est peut-être venue de la ministre canadienne des Affaires étrangères Chrystia Freeland après s’être vue remettre le prix de diplomate de l’année 2018 à Washington. Elle a dénoncé les tarifs sur l’acier et l’aluminium en les qualifiant « d’absurdes » et a vigoureusement défendu la notion de préservation de l’ordre mondial fondé sur des règles – avec ou sans les États-Unis. « Je me rends compte que certains Américains ne croient plus que l’ordre mondial ne leur apporte un avantage quelconque, même s’ils ont aidé à le créer et en ont été le principal bailleur de fonds pour le soutenir », a indiqué Mme Freeland à un groupe de diplomates et de politiciens. Elle a été directe dans sa réponse concernant les tarifs, particulièrement en ce qui a trait à l’utilisation de l’article 232 des lois américaines relatives au commerce extérieur pour justifier la mesure par des motifs de sécurité nationale. « La mesure prévue en vertu de l’article 232 –qui se veut, permettez-moi de le rappeler aux gens, une considération de la sécurité nationale– est franchement absurde », s’indigne-t-elle. « Cette mesure est également illégale en vertu des règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Nous savons tous que nous serons plus forts avec les États-Unis dans nos rangs – et effectivement dans un rôle dominant. Mais peu importe quel sera le choix de ce grand pays en bout de ligne, permettez-moi d’affirmer clairement que le Canada sait où il se situe. »
Même si Mme Freeland n’a jamais invoqué le président en mentionnant son nom ou son titre, son commentaire final était assez clair.
« Vous pouvez croire aujourd’hui que votre taille vous permet de vous attaquer, à un contre un, à vos adversaires traditionnels et de remporter ces duels à coup sûr. Mais si l’histoire nous enseigne une chose, c’est bien que la prééminence d’un pays en particulier n’est jamais éternelle. »
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