Pendant la pandémie
Bien que l’industrie du transport aérien ait généralement fait preuve de résilience à la suite de perturbations et de crises majeures, il est douteux qu’elle puisse se rétablir aussi rapidement qu’elle l’a fait par le passé. Les compagnies aériennes manquent de liquidités, d’où la possibilité de faillites, de consolidations et même de nationalisations. Tout cela aura inévitablement des répercussions sur la fabrication d’avions civils, les chaînes d’approvisionnement et les entreprises de soutien après-vente.
Le secteur de la défense de l’aérospatiale s’en sortira mieux, car les contrats ont été conclus et les restrictions n’auront pas le même impact.
Du côté commercial, on s’attend à un affaiblissement des liens dans les chaînes d’approvisionnement ainsi qu’à des ralentissements aux niveaux national et international.
Les entreprises aérospatiales devraient connaître des problèmes de trésorerie en mai et en juin à mesure que de nouveaux calendriers de production seront établis. Dans le même temps, les sociétés reverront leur stratégie, leur empreinte industrielle et leur modèle d’exploitation. Il y aura probablement des réductions des effectifs et l’efficacité sera examinée. Les perspectives commerciales prévoient que l’automatisation et l’impression 3D dans la fabrication à grande échelle pourraient devenir la nouvelle norme. Les experts encouragent les entreprises à réduire leurs dépenses discrétionnaires et d’investissements, à demander des extensions des lignes de crédit, à rechercher des réductions des coûts d’infrastructure, des baisses d’impôts et un soutien dans les chaînes d’approvisionnement. En outre, en raison de la perte de parts de marché, certains fournisseurs et prestataires spécialisés peuvent subir des pressions financières.
Comme il est difficile de déterminer la durée des restrictions en ce qui concerne les voyage et s’il y aura une deuxième vague du virus, l’industrie aérospatiale prend en considération trois scénarios, à savoir :
- Si les restrictions durent deux mois, les niveaux de voyage reviendraient théoriquement à 100 % à la fin de 2020 et au début de 2021. Le remplacement des avions serait reporté de 12 mois. La demande cumulée pour nouveaux avions serait réduite de 800 aéronefs sur une période de dix ans.
- Si les restrictions durent quatre mois, les niveaux de voyage reviendraient à 90 % des niveaux d’avant la crise d’ici le début de l’été 2021. Le remplacement des avions serait reporté de 18 mois. La demande pour nouveaux avions serait réduite de 15 840 aéronefs sur une période de dix ans, ce qui nécessiterait une réduction de la taille de l’industrie et un affinement des stratégies en matière de remplacement et de la gamme de produits dans les flottes. Par exemple, les A220 seraient choisis en faveur des A320.
- Si les restrictions durent six mois, les niveaux de voyage reviendraient à 80 % des niveaux d’avant la crise d’ici l’été 2022. Le remplacement des avions serait reporté de 24 mois.
Dans ce scénario, la demande pour nouveaux avions chuterait de 50 % au cours des dix prochaines années, ce qui entraînerait des mesures d’austérité pour réduire les effectifs et se restructurer. Toutefois, les commandes existantes et les obligations contractuelles des entreprises atténueront certains des effets de la pandémie.
Étant donné que l’ERR est déterminé par la taille et l’activité de vol des flottes mondiales, ce domaine est le premier à subir des ondes de choc dus à la pandémie. Une fois que les avions sont cloués au sol, la demande d’entretien liée à l’ensemble du cycle de vol diminue. Les fournisseurs de services d’ERR et de pièces détachées seraient touchés, car les ateliers d’ERR utiliseraient d’abord les stocks existants avant d’acheter de nouvelles pièces aux fournisseurs.
Si les prix du pétrole restent bas, les compagnies aériennes peuvent se permettre de faire voler des avions plus anciens et moins économes en carburant, ce qui aura également des répercussions sur la fabrication et l’assemblage des avions.
Trois défis sont à prévoir indépendamment du scénario et de la durée des restrictions concernant les voyages.
- Report ou annulation des commandes d’avions.
- Attendre le retour du nouvel avion.
- Réduire au minimum le temps nécessaire pour ajuster les chaînes d’approvisionnement.
Après la pandémie
La réduction des activités des équipementiers et des fournisseurs est probable, car ils doivent s’adapter à de nouvelles réalités, comme la perte des économies d’échelle. Les entreprises devront également procéder à des ajustements en matière d’efficacité, qui peuvent prendre la forme d’une automatisation. Celle-ci permettrait de réduire les contacts entre humains et pourrait être considérée comme une mesure de santé et de sécurité compte tenu des nouvelles circonstances. Il se peut également que des fournisseurs en situation plus précaire abandonnent le marché et qu’on assiste à une certaine consolidation de l’industrie.
Les équipementiers pourraient avoir une plus grande présence et une plus grande concentration dans l’industrie ou il pourrait y avoir un modèle industriel plus équilibré entre les équipementiers et les fournisseurs de niveau 1.
Une intervention gouvernementale pourrait s’avérer être nécessaire au moment où les entreprises passent à un nouvel environnement opérationnel.