Par Dave Chartrand, vice-président général canadien de l’AIM
La dissidence et la protestation font autant partie de la démocratie que les élections, la participation et le débat. Le droit de protester a servi de véhicule à de nombreux mouvements qui sont parvenus à transformer notre société pour le mieux; le mouvement syndical est d’ailleurs un symbole du pouvoir collectif et de la lutte pour une société meilleure.
Au cours des dernières semaines, un mouvement a vu le jour à Ottawa et ailleurs, en réaction à la pandémie et au poids qu’elle fait peser sur les épaules des Canadiens. La pandémie a mis en lumière les points faibles de notre système, comme l’accès aux soins de santé, la redistribution de la richesse, le logement abordable et les conditions de travail.
Les mauvais choix politiques qui sont venus réduire la couverture de nos programmes sociaux, le financement de nos principaux services publics, les aides aux chômeurs, pour n’en citer que quelques-uns, n’ont fait qu’empirer avec le COVID-19, démontrant ainsi que nos services publics, dont nous avions tant besoin, ont été négligés au cours des dernières décennies. Il n’est pas surprenant qu’après deux ans d’incertitude et de défaillances du système, les gens se sentent trahis, en colère et indignés, et qu’ils aient besoin de changement.
L’élan initial du rassemblement était ancré dans le mécontentement à l’égard des politiciens et de leurs piètres choix politiques qui nous ont privés des services dont tant de Canadiens avaient besoin, mais sur lesquels ils ne pouvaient compter. Malheureusement, cette protestation a été dépassée et réorientée par un mouvement qui se nourrit de haine, de racisme, d’antisémitisme et d’islamophobie.
Nous ne devons pas confondre cette protestation avec les mouvements alimentés par un désir de justice, d’équité et d’impartialité, par des mouvements qui s’efforcent d’améliorer les choses pour chacun d’entre nous. Tout mouvement ancré dans la haine et l’exclusion est un mouvement dont nous devons nous méfier.
Ce que nous voyons en ce moment n’est pas un mouvement qui est inclusif et qui vise à atteindre la justice et l’équité. Cette mobilisation n’est pas non plus un convoi de camionneurs, elle a cessé de l’être depuis longtemps. La plupart des camionneurs ne cautionnent pas la violence et la haine qui sont exprimées dans cette mobilisation et leurs véritables préoccupations, liées à leurs conditions de vie et de travail sont actuellement mises à mal par les actions d’extrémistes de droite.
La mobilisation d’Ottawa est passée d’une manifestation citoyenne légitime à un soulèvement contrôlé par des groupes d’extrême droite qui épousent des croyances et des principes auxquels la grande majorité des Canadiens s’opposent. De plus, elle est maintenant financée par des groupes extrémistes internationaux, ce qui montre à quel point ce soulèvement s’est déconnecté du véritable problème. En d’autres termes, d’une contestation d’abord légitime, elle est devenue le cheval de Troie de groupes extrémistes qui exploitent l’incertitude concernant la vaccination et le passeport vaccinal pour faire passer un programme politique d’extrême droite.
Plutôt que de jouer le jeu de l’extrême droite utilisons notre force collective pour améliorer notre société et notre pays en nous engageant sur les questions du jour, en votant, en nous exprimant. Le pouvoir de l’action politique ne doit pas être sous-estimé, et ceux qui ont des préoccupations légitimes doivent s’adresser à leur député local.
Ne les laissons pas utiliser la confusion, l’incertitude et le mécontentement d’honnêtes citoyens à leurs fins. Les extrémistes de droite ne sont pas les amis des syndicalistes. Une grande partie de ce pour quoi les syndicats se sont battus serait perdue s’ils parvenaient à leurs fins. Ne vous laissez pas entraîner, défendez fermement ce que vous savez et ce en quoi vous croyez, et nous montrerons sûrement à ceux qui attisent les flammes de la haine et de la division que leur vision n’est pas la nôtre.