29 mai 2020
Par courriel: justin.trudeau@parl.gc.ca
Le très honorable Justin Trudeau, C.P., député
Premier ministre du Canada
Cabinet du premier ministre
80, rue Wellington,
Ottawa (Ontario) K1A 0A2
Monsieur le Premier ministre,
Je vous écris au nom de 36 000 membres de l’Association internationale des machinistes et des travailleurs de l’aérospatiale (AIMTA), et de milliers de nos membres dans l’industrie du transport aérien pour exprimer nos soucis au sujet de la demande de WestJet d’être exemptée de la Section XI du Code canadien du travail.
Nous sommes d’avis que la demande est non seulement sans fondement et qu’elle ne tient pas compte de ses responsabilités en tant qu’entreprise citoyenne et employeur, mais qu’elle pose un problème majeur dans l’industrie si elle est accordée. En donnant suite à cette demande, le gouvernement fédéral établirait un précédent permettant aux employeurs de l’industrie du transport aérien de contourner les normes minimales et les protections accordées aux travailleurs en cette période tumultueuse et difficile. En outre, permettre une exemption éliminerait la sécurité que les travailleurs bénéficient sous la réglementation sur les licenciements collectifs. Pendant cette crise majeure, les droits des travailleurs doivent être protégés.
Les règlements sur les licenciements collectifs stipulés par la loi fédérale exigent qu’un employeur donne un préavis de 16 semaines aux groupes de 50 travailleurs ou plus qui sont licenciés, et qu’un tel employeur travaille avec le gouvernement à l’élaboration d’un plan d’atténuation qui non seulement aide les travailleurs, mais aussi réduire l’impact du chômage de masse dans une communauté donnée. La loi exige que les employeurs qui ne peuvent pas émettre un préavis de 16 semaines paient les travailleurs au lieu d’un tel préavis. Les règlements profitent non seulement aux travailleurs individuels, mais aussi aux collectivités, et visent à alléger la pression sur les programmes sociaux en raison du chômage. Il y a un portrait plus large à considérer, ce que WestJet montre un mépris flagrant.
Il est honteux qu’à une époque où l’incertitude est ancrée dans notre vie quotidienne, WestJet cause des troubles supplémentaires à ses employés. WestJet a bénéficié de fonds publics sous la forme de programmes fédéraux, mais, en même temps, elle se soustrait à sa responsabilité envers les travailleurs qui ont accru la valeur de leur entreprise. Si les employeurs sont incommodés par la loi, le gouvernement fédéral doit appliquer les normes minimales prévues dans le Code canadien du travail.
Ce qui est encore plus problématique, c’est que WestJet a démontré une tendance de comportement lorsqu’elle est confrontée à des lois qui sont perçues comme des obstacles à ses activités. En 2019, ils ont demandé une exemption sur les lois concernant les heures de travail, la période de repos des travailleurs, le refus d’heures supplémentaires, y compris le préavis de changements d’horaire et de quarts de travail.
Des corporations comme WestJet ne peuvent pas négliger leur responsabilité sociale envers les communautés où elles exercent leurs activités. Alors que le public se rallie aux entreprises qui ont été la source de l’emploi, les mêmes entreprises ont l’impression que les lois et les règlements peuvent être appliqués par choix, selon les circonstances auxquelles elles sont confrontées.
Les travailleurs du transport aérien comprennent parfaitement la crise dans laquelle se trouve leur industrie, des milliers d’entre eux ont déjà perdu leur emploi, et leurs familles en souffriront pendant des générations. Pourtant, les travailleurs ont accepté cette réalité et ont vu peu de soulagement face aux situations difficiles auxquelles ils font face, mis à part les programmes d’urgence du gouvernement fédéral. L’allégement hypothécaire s’est retourné contre lui, en ce sens que les banques doublent les intérêts sur les paiements manqués, que l’allégement des loyers est inexistant et que, malgré toutes les difficultés, la plupart des Canadiens vivent ces temps incroyablement difficiles avec une résilience remarquable.
Dans tout autre contexte, cette demande serait absurde et rejetée sans débat; après tout, les travailleurs se retrouvent sans avantages sociaux, perdent leur gagne-pain ou travaillent dans des conditions dangereuses parce qu’ils n’ont pas le choix, Pourtant, les syndicats et les travailleurs n’ont pas demandé d’exemption de leurs obligations en tant que citoyens et travailleurs.
L’AIMTA s’attend à ce que le gouvernement fédéral reconnaisse l’injustice et les dangers de cette demande et tienne WestJet responsable devant la communauté élargie et ses employés. Les travailleurs, à ce stade, méritent le luxe de disposer du temps nécessaire pour planifier ce qui s’avère être une catastrophe économique.
Monsieur le Premier ministre, Madame la Vice-première Chrystia Freeland, la ministre Tassi et le ministre Garneau, des millions de travailleurs canadiens comptent sur vous pour faire ce qui s’impose et rejeter la demande sans fondement.
Respectueusement,
Stan Pickthall
Vice-président général – Canada
AIMTA
SP/jc
Cc L’honorable Chrystia Freeland,
Vice-premièreministre et ministre des Affaires intergouvernementales
chrystia.freeland@parl.gc.ca