Bruxelles, le 20 avril 2010 : Une délégation de dirigeants syndicaux de pays membres du G20 qui assistait à une rencontre avec les ministres du Travail et de l’Emploi du G20 hier après-midi, à Washington, a averti que la faible reprise économique en cours risque d’être une reprise sans emploi, qui pourrait même entraîner un nouveau déclin de la production si les gouvernements manquent d’accorder davantage d’importance à la création d’emploi décent.
Sharan Burrow, présidente de l’Australian Council of Trade Unions (ACTU) et de la CSI a déclaré aux ministres : « Les gouvernements doivent faire preuve de la même volonté politique à l’heure de s’attaquer au chômage et au sous-emploi mondial qu’ils ne l’ont fait en s’attaquant à la crise bancaire à la fin de 2008. Nous ne pouvons nous permettre de perdre une décennie entière à la stagnation des marchés du travail. » Nombre d’institutions internationales, de l’OIT jusqu’au FMI, ont prédit qu’il n’y aurait pas de diminution dans les taux de chômage au cours des prochaines années si les gouvernements manquaient d’adopter des stratégies vigoureuses en matière de création d’emploi.
Richard Trumka, président de l’AFL-CIO, qui a organisé la délégation syndicale aux États-Unis, a ajouté : « Les ministres du Travail doivent jouer un rôle pivot pour ce qui a trait à la formulation de la politique économique des gouvernements. Ils devront accorder une attention particulière à l’écart grandissant entre la reprise économique et la croissance de l’emploi, de même qu’entre la productivité et les salaires. »
Des syndicalistes du Brésil, du Canada et de plusieurs autres pays ont mis en exergue les problèmes liés à l’insécurité croissante en matière d’emploi, la dégradation des conditions de travail et le déclin des salaires réels. Ils ont, par ailleurs, exhorté les gouvernements à adopter des politiques fondées sur le Pacte mondial pour l’emploi adopté à la Conférence de l’OIT en juin dernier. Les dirigeants syndicaux ont protesté contre les propositions émanant de certains représentants des employeurs également présents à la consultation avec les ministres, qui prônaient des modalités d’emploi encore plus précaires. Les dirigeants syndicaux se sont prononcés en faveur de stratégies promotrices d’emplois verts, de mesures en soutien aux groupes vulnérables et basées sur le travail décent et de la création d’un plancher universel en matière de protection sociale.
La délégation a également soulevé les implications fiscales de l’actuelle crise. Ils ont insisté sur le fait que les gouvernements devraient se garder de réduire les mesures de stimulation jusqu’à ce que les taux d’emploi se rétablissent aux niveaux pré-crise et ce de manière durable. Ils ont également appelé au partage équitable du fardeau découlant des mesures adoptées en réponse à la crise, à travers un recours à des systèmes fiscaux plus progressifs, y compris, notamment, l’adoption d’une taxe sur les transactions financières.
Faisant allusion au Cadre pour une croissance forte, durable et équilibrée adopté au Sommet du G20 à Pittsburgh en septembre dernier, les dirigeants syndicaux ont appelé à ce que l’OIT soit investie d’un mandat spécifique pour soumettre au G20 des recommandations afférentes aux enjeux de l’emploi et de la protection sociale, plutôt que de laisser cette responsabilité au FMI.
Les dirigeants syndicaux ont demandé instamment aux ministres du Travail et de l’Emploi du G20 de créer un groupe de travail chargé du travail décent et de continuer à se réunir régulièrement. Pour sa part, Guy Ryder, secrétaire général de la CSI, a fait remarquer que le travail des ministres ne faisait que commencer : « Les politiques de stimulation adoptées par les pays du G20 ont peut-être permis de sauver entre 12 et 14 millions d’emplois, mais en attendant 30 millions d’autres emplois ont été perdus durant la récession mondiale. Les ministres ont certainement de quoi s’occuper pour faire en sorte que la création de travail décent devienne l’objectif primordial de leurs gouvernements, » a dit Ryder.
« Il revient également aux ministres de s’attaquer au gouffre croissant de l’inégalité des revenus des 20 dernières années, qui a contribué à l’économie de bulle volatile à l’origine de la crise. Il leur appartient de renforcer et non pas d’affaiblir des institutions comme la négociation collective et le salaire minimum, qui encouragent une distribution plus équitable des revenus », a remarqué John Evans, secrétaire général de la Commission syndicale consultative auprès de l’OCDE (TUAC).
La délégation syndicale était composée de hauts responsables d’organisations affiliées à la CSI des pays du G20 et de l’ACFTU (All-China Federation of Trade Unions). Des dirigeants de plusieurs pays n’ont pas pu se rendre à Washington en raison de la fermeture d’une grande partie de l’espace aérien européen, due au nuage de cendre volcanique.
Les propositions détaillées présentées para la délégation syndicale figurent dans la déclaration émise par le groupement Global Unions pour la réunion.